Barbouzerie dans la haute hiérarchie ? … Monsieur le directeur régional, vous avez récemment attiré l’attention des services sur un point précis de la déontologie. Par une note de service du 20 mars 2014, vous rappelez aux agents les règles à suivre en matière de « sécurisation des données issues des bases des opérateurs privés ou des administrations partenaires de la DGDDI ».
Nous ne contestons en aucun cas le bien fondé de la notion de secret professionnel rappelé par cette note. Nous regrettons néanmoins que les rappels hiérarchiques à la déontologie des agents ne s’applique pas aux énonciateurs eux-mêmes. En d’autres termes, faîtes ce que l’on vous dit, pas ce que l’on fait…
Et c’est pourquoi nous vous demandons quelques précisions sur certains points pour le moins ambigus soulevés ici.
- D’abord, nous nous étonnons de lire que dans l’objet de la note, les « opérateurs privés » passent avant les « administrations partenaires [sic] de la DGDDI ». C’est peut-être une pure question de forme. Mais comme l’a dit Victor Hugo : « La forme, c’est le fond qui remonte à la surface ». Et, fondamentalement, jamais un privé ne devrait passer avant une administration, bras armé de l’intérêt général.
- Ensuite, si nous comprenons parfaitement que les agents agissent dans un environnement complexe et disposent parfois de l’accès à de nombreuses bases de données, nous aimerions des précisions sur la manière dont, d’après vous, certains collègues disposent d’informations confidentielles sans « être directement habilités » pour cela. (cf le quatrième paragraphe). Dans quelles conditions ces informations ont-elles été obtenues ?
La douane met-elle les collègues concernés en situation délicate par rapport au droit ou est-ce les administrations à l’origine de ces renseignements qui prennent beaucoup de liberté vis-à-vis des règles ? Et dans ce cas, quelle doit être la position de la DGDDI face à ces informations ?
- De même, si l’implication des chefs de service dans l’application des consignes découle logiquement du principe hiérarchique, nous ne pouvons pas fermer les yeux sur la mystérieuse « traçabilité des opérations » évoquée dans le dernier paragraphe.
Qu’est-ce que cela signifie ? Que signifie le beau néologisme d’« enliassage des copies écrans » ? À l’heure de la dématérialisation, va-il falloir constituer des archives papiers supplémentaires ? À l’avenir, y aura-t-il un Big brother pour chaque agent ?
HONNÊTETÉ DANS LA NOTE ?
Finalement, quelle est la pertinence de cette note ? Pourquoi l’avoir sortie à ce moment ? Y a-t-il eu des fuites, des informations sensibles ont-elles été divulguées, s’agit-il d’une réaction à un ou plusieurs cas disciplinaire(s) précis ?
Vous n’avez peut-être pas à nous fournir ces informations, mais sachez que la première réaction des agents devant ce genre d’écrit est bien de se demander s’il s’agit de faire suite à une affaire de manquement aux obligations déontologiques, ou, plus probablement, que d’une nouvelle tentative d’intimidation et de flicage à leur encontre.
La dégradation des conditions de vie, l’augmentation de la souffrance au travail est toujours souhaitée dans le cadre d’une réduction des effectifs et plus largement de casse de la fonction Publique. Et ça, tout le monde le sait, comme tout le monde sait que si les opérateurs sont de moins en moins contrôlés, les douaniers sont eux de plus en plus fliqués.
POUR CONCLURE ?
Étrange inversion des rôles, qui voit des fonctionnaires assermentés placés en permanence en position de suspects, que l’on menace du code pénal, du code des douanes et du livre des procédures fiscales1 et dans le même temps des opérateurs bénéficier de moins en moins de contrôles au nom de la mise en concurrence du dédouanement à l’échelle européenne…
Étrange note, qui ne se contente pas de rappeler des évidences mais semble aussi prendre les agents pour des gamins idiots à qui il faudrait apprendre à ne pas divulguer des mots de passe et des informations sensibles… À quand une note pour nous apprendre à traverser la route dans les passages protégés ? Il est vrai « faire de la pédagogie » est l’expression à la mode un peu partout, tant il est évident que si la Nation n’accepte pas la direction que le monde politique et médiatique responsable entend lui faire prendre, c’est parce qu’elle n’a pas compris, la pauvre enfant, qu’ on ne lui veut que du bien…
Étrange note, qui se conclut par la signature que chaque agent devra y apposer. Quelle sera la valeur légale de cette signature ? Quel sombre dessein ces signatures doivent-elles cautionner ? Un nouveau pacte faustien ?
L’intégralité de notre courrier de réponse :
Le courrier illustré, sous format tract :